français

  • Le français, une langue sexiste ?

    La langue est le reflet de la société, n’est pas figée et peut contenir des règles grammaticales très différentes d’une autre langue.

    Prenons en français la règle du « masculin l’emporte sur le féminin », apprise à l’école et appliquée spontanément. Le pronom de la 3° personne au pluriel est « ils » pour le masculin et « elles » pour le féminin ; quand le groupe est mixte, nous utilisons le pronom « ils », même avec 1 homme et 99 femmes.

    En français :  « elles » + "il" = « ils »

    Ainsi, l’écrivaine féministe Benoîte GROULT était choquée de voir que la phrase : « Cent femmes et un chien sont revenus contents de la plage. » devait se conjuguer au masculin à cause de la présence d’un animal de genre masculin face à cent individus féminins.

    En anglais et en néerlandais il n’y a pas de préférence masculine et le pronom à la 3° personne du pluriel est invariable : « they » en anglais et « zij » en néerlandais.

    Nous pouvons nous interroger sur certains choix effectués dans le passé. Avant le 17e siècle, la règle latine de proximité et de la majorité servait pour accorder les adjectifs et les participes passés.

    La masculinisation du français date du 17° siècle, quand sont apparues plusieurs règles grammaticales favorisant le genre masculin au détriment du féminin. C’est l’aboutissement d’une réflexion sur la place des femmes et des hommes dans la société, et en particulier sur le terrain politique. Il est question de savoir si les femmes peuvent gouverner, ne pas obéir à leur mari ou exercer les mêmes fonctions que les hommes. En 1647, douze ans après la création de l’Académie française, l’un de ses membres, Claude FAVRE de VAUGELAS, préconise que le masculin doit l’emporter en grammaire au motif que « Le masculin est plus noble que le féminin ». En 1767, Nicolas BEAUZÉE, également membre de l’Académie, déclare que « Le genre masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle ». En 1882,  l’État tranche en faveur du masculin lorsqu’il rend l’instruction publique obligatoire. Des mots présents dans le français ancien disparaissent, comme « peintresse », « chirurgienne » et « autrice », métiers que les femmes commençaient à exercer. Alors que les métiers moins valorisés socialement n’ont jamais été privés de leur féminin lorsqu’ils en avaient.

    Le mot « homme » dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme a longtemps servi à écarter juridiquement les femmes du droit de vote. Les rédacteurs de la déclaration de 1948 voulaient écrire « Man Rights » et ce fut la seule femme présente, Eleanor Roosevelt, qui se battit pour que soit adoptée la formulation « Human Rights », afin de couvrir également les droits des femmes. Expression que la France a traduite par « Droits de l’Homme », contrairement au Québec francophone par exemple, qui écrit « Droits de la personne humaine ».

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